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Une tension croissante en RDC après la tenue des élections

Le 20 décembre 2023 avait lieu en RDC la tenue d’élections présidentielle, législatives, provinciales et locales. C’est l’actuel président Félix Tshisekedi qui a été réélu, avec plus de 73% des voix. Malgré l’espoir d’un processus démocratique pacifique et transparent, des critiques ont émergé pour dénoncer des résultats soi-disant troubles et frauduleux. Plusieurs acteurs internationaux étatiques et non-étatiques ont averti du risque de violences dans un pays déjà miné par d’importantes crises dans les régions du Nord-Kivu et d’Ituri.

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Le président sortant Félix Tshisekedi, largement réélu à la tête de la République démocratique du Congo, et son épouse Denise Nyakero saluent leurs soutiens après les résultats du scrutin, le 31 décembre 2023 à Kinshasa. AP Photo/Samy Ntumba Shambuy



L’enjeu des élections 


 Ces élections étaient, avec la passation de pouvoir de 2019, le seul changement politique pacifique de l’histoire du RDC. Le pays avait auparavant vécu une succession de coups d'État et de violentes révoltes caractérisant tous changements de dirigeants politiques. Pour cette raison, ces élections constituaient un risque pour la stabilité du pays, déjà fragilisé par des crises humanitaires à l’Est liées à la présence de groupes armés rebelles venus d’Ouganda. 6 millions de personnes auraient péri en RDC des suites de ce conflit. La présence d’une mission des Nations Unies, appelée MONUSCO, n’avait pas suffi à mettre fin aux violences. Face à son échec, son retrait a été programmé. Pourtant, plusieurs ONG ont mis en avant l’importance d’une surveillance internationale face aux risques de troubles politiques liés aux élections. Dans une lettre ouverte, Action Aid international, Oxfam, Search for Common Ground et bien d’autres ont démontré la nécessité d’une telle chose : “Les élections en RDC ont toujours été difficiles, et celles prévues pour décembre 2023 augmentent les risques d'une situation déjà désastreuse. [...] On craint de plus en plus que des élections crédibles ne puissent être organisées dans de nombreuses régions de l'est, ce qui risque d'accroître encore plus la violence.”



“Un simulacre d’élections” ?


Le RDC souffre d’un manque d’infrastructures rendant difficile l’application d’un processus démocratique à l’échelle nationale. Cela a conduit au prolongement de la durée de scrutin dans les régions les plus reculées. Le comptage fut effectué une première fois, avant d’être révisé par la Céni, la Commission électorale du RDC. En effet, plusieurs fraudes, intimidations et vandalisme ont été observés. La commission a alors choisi d’annuler le vote de certaines circonscriptions. Si la vérification de la Céni aurait dû assurer la crédibilité des résultats, plusieurs individus, dont les Églises catholiques et protestantes ainsi que Théodore Ngoy, candidat à l’élection présidentielle arrivé dernier, les ont contestés, les qualifiant de “simulacre”. Pour eux, l’élection présidentielle présente une "multitude d'irrégularités". Ngoy a alors demandé à la Cour constitutionnelle le renouvellement de l’élection présidentielle. Sa demande a finalement été rejetée compte tenu de l’important écart de vote entre le candidat élu et ses concurrents. 


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Après les élections en RDC, tensions et appels à la "retenue" © AFP



Le risque d’une remise en cause des résultats électoraux


La contestation des résultats par certains candidats liés aux troubles entourant les processus électoraux constitue une menace pour la stabilité politique du pays. 5 candidats ont annoncé faire une marche protestataire contre le résultat. Plusieurs nations craignent que ces manifestations débordent en révoltes plus violentes. Les ambassades du Canada, des Etats-Unis et certains pays d’Europe ont appelé le RDC à “faire preuve de retenue”, Le Haut-secrétaire des droits de l’homme de l’ONU a lui aussi partagé ses craintes : “Je suis très préoccupé par la montée des discours de haine à caractère ethnique et de l'incitation à la violence en République démocratique du Congo, en particulier dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu ainsi que dans les régions du Kasaï et du Katanga, après les élections générales du mois dernier". Remettre en question cette élection, c’est remettre en question le pouvoir présidentiel. Une méfiance envers le pouvoir étatique pourrait conduire à des révoltes et à une confrontation des forces présidentielles avec le peuple. De plus, une polarisation de la population est à prévoir entre ceux soutenant le président et ceux remettant en cause l’élection. 


Ainsi, la stabilité politique en RDC reposera sur la capacité de la Céni à justifier son comptage des votes. L’organisation a par ailleurs mis en place une commission d’enquête pour signaler et condamner les individus responsables des fraudes survenues au cours du scrutin. La paisibilité du pays dépend aussi de l’action du gouvernement sur les régions en crise de l’Est, et sur la présence d’alliés internationaux, comme demandé dans la lettre ouverte des ONG humanitaires, pour soutenir la lutte contre des groupes armés illégaux.



Anna Raqbi




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